dimanche 18 mars 2007

Baudelaire un jour, Baudelaire toujours


J'ai découvert Baudelaire à l'adolescence avec Les fleurs du mal et ce fut une révélation. Je me suis mise à écrire partout, sur mes cahiers, sur les tables de cours ou les murs de l'arrêt de bus, quelques phrases tirées de L'ennemi :

- Ô douleur ! ô douleur ! Le temps mange la vie,
Et l'obscur ennemi qui nous ronge le coeur
Du sang que nous perdons croît et se fortifie

Face à mes tourments adolescents j'avais trouvé quelqu'un qui exprimait toute la noirceur du monde ! J'ai épluché le recueil, lu et relu L'héautontimorouménos (le bourreau de soi-même), les Spleen, A une passante et bien d'autres...
C'est bien plus tard que j'ai découvert les Petits poèmes en prose. Des poèmes plutôt noirs, encore, mais auxquels la prose ajoute un effet plus caustique que grave. Le mauvais vitrier, La soupe et les nuages, Assommons les pauvres ! et surtout, surtout Enivrez-vous :

Il faut être toujours ivre. Tout est là : c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.
Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous.
Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, dans la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront : " Il est l'heure de s'enivrer ! Pour n'être pas les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous ; enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. "

Alors, pour ne pas sentir l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules, vous pouvez toujours tenter de vous enivrez de Baudelaire...

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